Cette année, nous avons souhaité vous proposer quelques portraits de passionnés. Des passionnés un peu spéciaux qui travaillent au quotidien pour vous, à développer les produits que vous porterez demain, à améliorer la recherche autour de la course à pied, mais aussi à vous organiser de belles courses.
Le premier à passer sous le feu des projecteurs est Stuart Brooke, le fondateur d’Ashmei que Jean-François a rencontré pour Globe-Runners.
Après avoir été diplômé en 1994 de la Royal College of Art de Londres dans le domaine du vêtement pour homme, Stuart a commencé à travailler chez Pentland, groupe anglais propriétaire de nombreuses marques dans le domaine du sport, comme Berghaus, Canterbury, ou Speedo. Cette expérience lui a permis de découvrir le milieu de l’industrie Outdoor, en balayant les domaines du design jusqu’à la production durant 4 années.
En 1997, il lance sa boite : Blue Associates, une entreprise de conseil en conception et approvisionnement de vêtements de sport. Aujourd’hui il travaille avec plus de 90 marques, telles que Rapha, The North Face, Vulpine ou encore Bentley !
Pourquoi les grandes marques font-elles appel à Blue Associates, ta boîte de conseil ?
Stuart : « Les concepteurs ont besoin d’inspiration. Ils ont besoin d’être stimulés et inspirés pour être capables de créer des produits innovants. Si un concepteur est entouré par le « familier », le « connu » alors tout ce qu’il produit commence à devenir commun. Nous ne nous entourons pas de ce « connu ». C’est pourquoi nous produisons le meilleur produit de sport avec de véritables innovations pour nos clients.
Les concepteurs des grandes marques baignent dans tout cela : ils sont entourés par une entreprise, une culture, des produits, des technologies et des gens qui parlent tous le même langage : ils sont tous « familiers ». Ils vont aux mêmes salons, visitent les mêmes points de ventes, voient les mêmes fournisseurs et utilisent les mêmes usines. D’ici peu, l’industrie va devenir stagnante et tout va devenir « familier ».
Parce que nous sommes une entreprise de conseils en conception de produits de sport, nous travaillons avec un panel de marques différentes, dans différents types de sport et tout autour du monde. Cela nous permet de rester dans l’original et d’être à l’écoute des nouvelles technologies, usines, tissus, salons et produits.
Nous transmettons ensuite ce savoir à nos clients en leur suggérant des alternativess au « connu », sur tout les points de vue : matériaux, technologies, processus de fabrication et d’approvisionnement… Et comme nous travaillons dans différents segments du vêtement de sport, nous approchons aussi le style différemment en recherchant les tendances générales de la mode plutôt que de nous focaliser sur nos concurrents. »
Stuart ne s’est pas arrêté là ! En 2012, il se lance un nouveau défi : créer sa marque. Ce sera Ashmei ! Son objectif est dans la continuité de son entreprise de conseil : ne pas faire comme les grands de l’industrie en sortant des produits pour un prix donné, ou avec des matériaux sur étagère, mais en mettant les performances de l’athlète au coeur de ses choix, et en choisissant les matériaux pour atteindre ses objectifs !
La marque de fabrique des produits Ashmei : l’utilisation d’une laine extra-fine de Merinos, laine issue d’un mouton élevé en Australie et Nouvelle-Zélande, dans la conception de ses produits.
Comment t’est venue l’idée d’utiliser le Mérinos pour faire des vêtements de sport ?
Stuart : « J’ai commencé à courir il y a environ 5 ans, et vu que je suis un « geek guy », j’ai acheté les meilleurs équipements pour courir. Quelques sorties plus tard, portant ces nouveaux habits, je les ai trouvés nuls ! Ils se ressemblent tous, tous fabriqués avec les mêmes matériaux synthétiques. Ces fibres vous réchauffent mais vous font aussi suer, ce qui est la dernière chose qu’un coureur veut !
Je me suis alors mis à courir avec des premières couches en mérinos et je me suis senti plus au frais. Ce fut mon « Eureka » ! Après quelques recherches, je n’ai pas trouvé de marque développant des produits en mérinos qui soient vraiment orientés pour le sport. J’ai commencé à me demander s’il n’y avait pas une place sur le marché du vêtement de sport pour une marque qui développerait ses produits, comme Apple ou Dyson dans leurs secteurs.
Un seul mot d’ordre : mettre l’accent sur la performance et être le meilleur que vous pouvez, sans compromis. » Voilà comment Ashmei est née …
A 46 ans, Stuart gère maintenant une petite équipe de 4 personnes, du côté d’Aldbury, dans la campagne, à 60km au nord de Londres et fait appel à quelques consultants pour la communication. On y retrouve toujours cette volonté de proposer le meilleur produit : quasiment une trentaine de produits au catalogue, destinés à la pratique de la course à pied, du vélo et depuis peu du triathlon !
Peux tu nous raconter comment se passe la journée du fondateur d’une « petite » marque de vêtement de sport ?
Stuart : « C’est chargé ! La journée commence vers 6h, avec un petit tour sur les mails de la nuit qui viennent de nos distributeurs et de nos producteurs de l’Extrême Orient. Je leur réponds rapidement pour qu’ils continuent ou adaptent leur travail avant que nos concurrents le fassent généralement vers 9h. Ces 3h d’avance sont un réel avantage pour avoir toute l’attention de nos partenaires.
Je deviens ensuite un vrai barista : un café fort pour moi, un café doux pour ma femme et des « bambi chino » pour mes 2 enfants avant de conduire ma grande fille Meisha à l’école ! Meisha est la muse derrière le nom de la marque, Ashmei étant un anagramme de son nom. Ensuite je me rends directement au bureau, j’arrive vers 8h pour répondre aux autres emails et me préparer avant que le reste de l’équipe arrive.
Notre bureau est installé sur une longue table de 8 mètres que nous partageons tous. Tout le monde sait ce qui se passe dans l’entreprise, ce qui rend la communication très facile. Cela réduit la quantité de réunions, car nous avons souvent besoin de prendre des décisions rapidement. Je déteste les bureaux palace qu’ont habituellement les PDG, je préfère largement mettre mes écouteurs si je dois me concentrer, ou me retirer dans la salle de réunion, pour une conversation privée. Travailler au plus proche de mon équipe est la clé pour que nous soyons tous sur la même longueur d’onde et que je reste informé des activités quotidiennes et des décisions.
Toutes les commandes sont emballées dans la matinée avant la collecte de 15h, nous recevons aussi nos échantillons et prototypes. Le bureau se transforme alors en déballage de cadeaux de Noël pour moi ! Je veux toujours les essayer en premier, c’est vite la bagarre car chacun veut découvrir les prototypes … Je commence ensuite à les évaluer, et à convenir d’un plan pour l’après midi, avec Elliot qui dirige le développement.
Le déjeuner est l’affaire de tous dans le bureau, nous faisons un « Lunch Club » en préparant à tour de rôle, le repas pour l’équipe. Je dois avouer que, quand c’est mon tour, l’effort et le temps pris n’est pas le même que certains autres membres de l’équipe. En particulier Robert (directeur des ventes) qui apporte assez souvent de bons petits plats qu’il cuit la veille. Je suis sûr que Rob pourrait gagner Masterchef ! Cette pause est très agréable et permet de souder l’esprit d’équipe : nous prenons ce temps plus comme des individus que des employés de l’entreprise.
L’après-midi est un temps consacré au produit. Les communications avec l’Extrême-Orient commencent à se calmer ce qui nous permet d’évaluer les échantillons. Je critique tous les échantillons en terme de coupe, fonction, qualité et style. Comme tu as déjà pu le voir, je suis un gars des produits. Avec Ashmei et Blue Associates tout tourne autour du produit. Ce qui me passionne en tant que concepteur et patron c’est de faire que tous les produits soient 100% parfaits. »
« Ensuite, si nécessaire, on passe aux tests des échantillons : à pied ou à vélo ! Nous avons la chance que nos bureaux soient basés dans les Chilterns et sur le domaine d’Ashridge qui comprend plus de 2000 hectares de forêt qui sont le lieu d’essai parfait.
J’essaie de quitter le bureau à 18 heures pour manger avec ma famille, baigner les enfants et les mettre au lit. Un dernier regard sur le téléphone pour vérifier l’activité des réseaux sociaux et répondre aux e-mails urgents, il est alors temps de se détendre. Le vin ou un gin tonic peuvent (ou non) être inclus … »
Merci Stuart d’avoir pris le temps de répondre à nos questions.
N’hésitez pas à visiter le site de la marque Ashmei pour découvrir comment se concrétisent les produits mis au point par Stuart ! Si vous croisez un jour la fameuse caravane métallisé, n’ayez pas peur d’aller découvrir ce qu’il y a dedans !