Le Trail Côte d’Opale, c’est le rendez-vous incontournable des traileurs du Nord Pas-de-Calais. Près de 7 000 participants engagés sur au moins une des distances proposées, à savoir 7, 8, 14, 21, 31, 42 ou 62km. Retour sur l’édition 2015 avec l’unique Daddy the Beat.
L’an dernier, j’avais décidé de retourner vers le trail après quelques tentatives lamentables par le passé. Et n’en faisant qu’à ma tête, je m’étais aligné directement sur le 62km du Trail Côte d’Opale. Je m’étais senti en difficulté dans les montées (environ 1500 m d+), à la peine dans les dunes de sable et un peu à la dérive sur la plage. Je ne devais ma place dans le premier tiers du classement qu’à mon endurance et à une pizza 4 fromages qui m’attendait à l’arrivée.
Un an plus tard, je comptais sur des entraînements plus variés étalés sur tout 2015, c’est-à-dire une dizaine de sorties sur les Monts de Flandre (des séances de 15-20km), presque autant sur le littoral, parfois sur le parcours même du Trail Côte d’Opale (des séances de 20-25km), ainsi que quelques compétitions dans des environnements un peu similaires (la SaintéLyon, le Trail de Seninghem).
Néanmoins, j’ai effectué toute cette préparation avec une grosse douleur au tendon d’Achille, si bien que je me suis rarement senti confiant ou rassuré sur mes capacités ou éventuels progrès. Pas de quoi réduire mon enthousiasme à l’approche d’une compétition qui était mon troisième objectif de l’année après le Marathon d’Anvers et les 100km de Steenwerck.
J’ai d’ailleurs été tellement enthousiaste que j’étais également inscrit sur le 8km nocturne du vendredi soir (à la cool, pour tâter le terrain), le 7km le samedi (pour accompagner Madame sur son premier trail), avant le 62km du dimanche. Si j’ajoute à cela des séances un peu trop chargées les 10 jours qui ont précédé, je ne pouvais pas m’étonner d’avoir les cuisses déjà bien dures au moment de prendre le départ.
Le Récit de mon Trail Côte d’Opale
C’est donc à 7h55 que j’ai pris place parmi les 600 autres concurrents sur la plage de Wissant et à 8h00 précises que nous nous sommes élancés pour 5km sur le bord de mer avant l’assaut du Cap Blanc Nez, redoutable montée, et première difficulté du parcours.
Quelques discussions avec les nombreuses connaissances, quelques rencontres à 12 km/h, sans oublier de choisir les bonnes trajectoires pour éviter de courir dans des flaques d’eau trop profondes, et nous étions déjà au pied du Blanc Nez.
Évidemment, nous ne sommes pas dans les Alpes et le point culminant des falaises ne dépasse pas les 135m mais justement, ce n’est pas pour cela qu’on grimpe tranquillement. Au contraire, l’objectif est de perdre le moins de temps possible si bien qu’on s’emploie de façon assez intense.
Enfin là-haut je réalise que mon rêve de courir une épreuve au top de ma forme restera une nouvelle fois une illusion. Qu’importe, j’entame la descente progressive vers Sangatte à fond les ballons. 3-4km à 15km/h sans trop forcer. Et inévitablement, je me prends le pied sur un caillou avant un vol plané de toute beauté. Je me ramasse à la petite cuillère en prenant soin de vérifier que personne n’est en train de me filmer.
Puis, pendant plus de 10km, on enchaîne 4 monts : Noires Mottes, Mont de Sombre (qui décrit bien mon état), Mont Rôti et Mont de Couple. Entre temps, j’alterne marche et course en pestant sur les parties de sable. Heureusement, je sais qu’au KM21 m’attend un bon ravitaillement et ma famille.
J’accélère en entrant dans Hervelinghen, porté par les encouragements. Mais personne ne m’attend. J’en déduis que les petits n’étaient pas prêts ou que l’accès au ravito était compliqué. J’attends 3-4 min, je discute vite fait avec un follower d’Instagram et je repars. Un concurrent devant moi fait tomber une seringue … Je ne calcule pas et je repars pour attaquer le Mont de Couple, dernière grosse difficulté quand on regarde le profil de la course. Ça passe laborieusement et je fais le constat que non, je ne suis toujours pas fait pour le trail.
Après la difficulté, la galère
Ce serait naïf d’imaginer qu’après 23km sur 62, il ne resterait plus qu’une portion roulante qui se gère comme une sortie longue. Bim ! Des dunes. Je savais qu’une longue zone de sable nous attendait un peu plus loin mais j’avais oublié les Dunes du Châtelet.
Je cherche à comprendre pendant quelques kilomètres comment il est possible de courir là-dedans. Je vocifère, évidemment, d’autant que les cuisses semblent me prévenir que les crampes n’attendront pas l’arrivée. J’en profite pour essayer de m’alimenter. Je n’ai pas très faim mais je sais qu’il faut le faire. Et je bois beaucoup en préventif les mélanges d’eau plate et d’eau gazeuse préparés la veille.
A la sortie du sable nous attend le Mont aux Leux. Rien de terrible mais j’aurais bien opté pour le menu descente relax. Nous sommes au KM37 et nous avons avalé près des deux tiers du dénivelé. Je croise Madame qui est venue seule m’avertir que du monde m’attendait au ravito du km41. On fait le pari que j’y arriverai avant elle.
Au bout de 4km de ligne droite et d’un faux plat descendant, j’arrive à Audresselles pour un ravitaillement bien copieux. J’aperçois mes enfants qui tapent dans la main des coureurs. Je les embrasse, je discute quelques minutes avec les potes qui participent à la version 42km du trail et je me sers en bonbons pour les refiler aux petits. Les sourires font du bien et permettent d’occulter un peu la difficulté qui arrive. Mes proches me reboostent, Madame change mes bidons et je repars.
Après la galère, l’enfer
2km plus loin nous attendent les Dunes de la Slack, que nous empruntons cette année par le côté le plus difficile. 4km interminables dont la majeure partie en montée. On s’enfonce, c’est infernal. J’essaie de discuter pour faire passer le temps mais le cardio est dans le rouge. Le moral n’est pas bon car je sais qu’après le sable nous avons 5km de plage de galets. Et surprise du chef : la traversée de l’embouchure entre la Slack et la Manche.
Quelques fous tentent de passer à la nage mais même s’il n’y a qu’une trentaine de mètres à traverser je constate qu’ils sont plus grands que moi et qu’ils ont de l’eau jusqu’au cou. Pour les autres, dont moi, ce passage se fera par un canoë que deux bénévoles tirent à l’aide d’une corde. Il faut faire la queue pour attendre son tour. Quelques coureurs rendent hommage à l’esprit trail à leur manière, c’est-à-dire en doublant.
Une dizaine de minutes plus tard, refroidi et les pieds bien mouillés, je repars enfin pour le retour vers Audresselles par la plage. Et encore les galets. Mes proches m’attendent encore mais je ne m’arrête pas car je suis vraiment de mauvaise humeur. Il pleut. Je commence les calculs pour estimer si oui on non j’ai des chances de faire mieux qu’en 2014.
Enfin un peu de plaisir
Je sais aussi qu’entre les km50 et 60, j’entame ma partie préférée, celle qui mène par les falaises de la sortie d’Audresselles au Cap Gris Nez et que j’avais eu le plaisir de faire découvrir aux membres du TeamUR en mars dernier (ils avaient adoré). Les 300m de dénivelé de cette portion passent assez bien malgré la fatigue. J’en profite pour reprendre du monde et pour admirer ce paysage dont je ne me lasse pas.
Je me prépare à l’ultime difficulté de l’épreuve : 4km de plage le vent de face. La pluie ne s’est pas interrompue depuis peut-être 2h. J’ai l’impression d’être au bout de l’aventure mais le village parait encore bien loin. Je sais que le Trail Côte d’Opale ne fait pas 62 mais 63km et à ce moment de la course, ça compte. J’alterne course et marche. Ma montre semble à l’arrêt. Je suis incapable de courir 500m d’affilée. J’ignore si c’est à cause de la fatigue ou de la lassitude.
Je pose le cerveau comme on dit et j’attends patiemment d’arriver aux escaliers qui signifient qu’on quitte cette foutue plage. C’est le dernier kilomètre. Les proches sont encore là, pas les enfants, restés à la sieste. Je prends leur énergie positive pour remonter la rue qui mène à l’arche. Les supporters sont nombreux, ça fait plaisir.
Et enfin, c’est fini. J’améliore mon temps de 25mn. Je suis un peu déçu de ne pas passer sous la barre des 7h pour 3 minutes (144ème sur environ 600). Surtout, je reste persuadé que malgré une place honorable au classement, je ne suis pas taillé pour le trail. Même si j’aime ça.
Avec le recul, je me laisse encore une chance de progresser. Mais en reprenant les bases du trail que je n’ai pas, surtout au niveau de la gestion de l’effort, de l’intensité dans les montées. Pour cela, je souhaite consacrer l’année 2016 à des distances plus courtes, pour acquérir de l’expérience et me sentir plus à l’aise sur ce fichu Trail Côte d’Opale.