Emil Zatopek fait partie de ces coureurs qui ont marqué l’histoire de la course à pied. Découvrez le portrait d’un athlète hors du commun, entré dans la légende après avoir fait vibrer des générations entières de coureurs.
C’est l’un des premiers noms qui viennent à l’esprit lorsqu’on pense aux légendes de la course à pied. Emil Zatopek, né en 1922 entre deux guerres dans l’actuelle République Tchèque est issu d‘une famille très modeste : 7ème d’une famille de 8 enfants et un père charpentier qui peine à joindre les deux bouts. Il lui est d’ailleurs interdit de courir : les chaussures coûtent cher à l’époque et il les use déjà très vite.
Dès l’âge de 16 ans il quitte la maison familiale et part travailler dans… Une usine de chaussures. Alors qu’il a arrêté de courir depuis des années, il est forcé de reprendre lorsque son entreprise organise un cross obligatoire, sans quoi il est licencié. Il termine second après une remontée un peu folle, se fait repérer par un entraîneur local et reprend goût à l’effort.
Dès lors, il se lance dans un entraînement de forcené qui deviendra sa marque de fabrique. Des distances hallucinantes parcourues chaque semaine dans la forêt près de chez lui et sur une piste en tartan, beaucoup d’exercice physique qu’on pourrait assimiler à de la PPG très intensive, bref, une préparation de Stakhanoviste. Côté compétition il prend d’abord le départ de courtes distances (1500, 3000 mètres notamment) et ira jusqu’au marathon au cours de sa carrière.
Entre 1944 et 1946, il se fait remarquer en battant à peu près tous les records de Tchécoslovaquie, avant de vraiment se faire connaître aux yeux du monde en 1947, lors des jeux interalliés de Berlin. Une révélation pour lui, honteux lorsqu’il arrive en Allemagne dans ses vêtements rapiécés de toutes parts (la vie est dure à l’époque sous le régime stalinien) face aux beaux coureurs scandinaves aux moyens incomparables. Une scène très bien racontée par l’écrivain Jean Echenoz dans un livre qu’on ne peut que vous conseiller : « Courir » qui est un chef d’œuvre de littérature en plus d’être un plaisir pour tout coureur.
Malgré ses complexes face à ces cadors du monde capitaliste, il remporte le 5000m en 14’31 ». Le début de la légende. Il remportera par la suite le 10 000 mètres olympique à Londres un an plus tard et prendra l’argent sur le 5000m, flambera aux championnats d’Europe de Bruxelles en 1950… Bref, il collectionne les breloques, et va même jusqu’à réaliser le triplé 10 000-5000-marathon en 1952 aux JO d’Helsinki, une performance inédite.
Les images qui restent de lui datent d’ailleurs de cette époque : un coureur pas très élégant, tiraillé, la tête penchée, grimaçant comme un diable et semblant au bord de l’implosion… Alors même qu’il surclasse tout le monde. Son style est moqué, critiqué par les entraîneurs, les journalistes, les observateurs. Lui répond simplement « je ne suis pas assez talentueux pour courir et sourire à la fois ».
En 1956, âgé de 34 ans, il dispute ses derniers jeux en se concentrant sur le marathon et termine 6ème, diminué après avoir été opéré d’une hernie et usé par des années à s’entraîner comme un forcené.
Reconverti ensuite dans l’armée, puis retraité avec des revenus plus que modestes, il meurt en 2000 suite à une pneumonie qui l’a beaucoup diminué. Le français Alain Mimoun, qui l’a affronté de nombreuses fois durant sa carrière déclare alors « avoir perdu un frère ».
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