Entretien avec Philippe Propage, l’entraineur de l’équipe de France de trail pour faire le point sur les modalités de sélection concernant les prochains championnats du monde de trail qui auront lieu en Italie en juin 2017.
Vous aviez dans l’idée de décrocher une première sélection en équipe de France pour les prochains mondiaux de trail ? Pas de panique, il vous reste encore une possibilité de briller pour espérer décrocher le sésame. Mais il faudra batailler ferme pour obtenir l’un des derniers tickets disponibles.
Ainsi, les 2 premiers (hommes et femmes) sur le trail du Ventoux 2017 (46 km) qui aura lieu le 19 mars prochain se verront offrir les dernières places qualificatives pour les mondiaux. Ils rejoindront les champion(ne)s de France de trail court et long, ainsi que les 2 premier(e)s français(es) des derniers championnats du monde.
Un éventuel complément de sélection (3 athlètes hommes et 3 athlètes femmes au maximum) pourra être réalisé après consultation du Comité de sélection, au vu des résultats 2016-17.
Une annonce tardive des modalités de sélection ?
Si certains se posaient récemment la question de l’annonce tardive des modalités de sélection, Philippe Propage lui coupe court à la polémique : « les règles sont claires depuis un moment. Les coureurs savaient depuis longtemps que les résultats des championnats de France et des mondiaux 2016 seraient pris en compte pour la sélection 2017, l’information était d’ailleurs disponible sur le site de la fédération depuis novembre 2015 ».
Pour rejoindre le reste de l’équipe de France, il faudra donc sortir une grosse performance au Ventoux. Cela nécessitera inévitablement de suivre une préparation hivernale sérieuse qui risque par la suite d’engendrer de la fatigue pour le reste de la saison. Il semble en effet compliqué d’atteindre son pic de forme en mars pour la sélection et de remettre le couvert en juin. « Pour bien faire il faudrait que la sélection soit déjà totalement établi, cela éviterait aux athlètes de se retrouver avec le couteau sous la gorge », confirme Philippe Propage.
Pour autant il tempère ses propos : « Cela verrouillerait le système et empêcherait les athlètes qui n’ont pas participé aux courses qualificatives de nous rejoindre. Le Ventoux laisse ainsi une opportunité à l’ensemble des coureurs qui le souhaitent de se sélectionner ». Une course de qualification au printemps permet également d’anticiper les critiques des détracteurs d’une sélection annoncée des mois à l’avance.
Un format qui change
Petit à petit, les choses se mettent en place au niveau international pour normaliser l’organisation des mondiaux. Tout est loin d’être parfait, mais ça avance. « En France, les organisateurs sont très performants, ce qui n’est pas forcement le cas ailleurs dans le monde. Nous sommes en avance, sur beaucoup de points, malgré ce que peuvent dire certains. Nous disposons d’une véritable expertise, mais nous devons accepter que d’autres pays n’avancent pas aussi vite que nous. Globalement, tout ça va dans le bon sens ».
Contrairement aux éditions précédentes, en 2017 les championnats du monde se dérouleront sur une distance d’environ 50 km pour 2800 D+, une annonce tardive qui change un peu la donne, et qui nécessite de s’adapter. Ce sera peut-être aussi l’occasion de voir émerger de nouveaux coureurs français sur la scène internationale. « Un format moins contraignant pour les organismes qui devrait permettre aux athlètes d’enchainer plus facilement », comme l’explique Philippe Propage.
Les coureurs engagés sur un calendrier diffèrent de celui proposé par la FFA n’auront finalement que peu de chances d’être sélectionnés, sauf à terminer dans les 2 premiers au Ventoux. « C’est vrai, mais vous pouvez tout de même constater que dans le cas du Ventoux nous nous sommes uniquement attardés sur l’aspect sportif puisque la course fait partie du challenge Salomon ». Peut-on voir ce choix comme une politique de la main tendue tant la multiplication des challenges et des épreuves finissent par diluer les performances de nos athlètes ?
On peut tout de même regretter l’absence de certains coureurs qui peut-être auraient leur place au sein de l’équipe de France. Sur le sujet, Philippe Propage ne mâche pas ses mots : « Il est souvent plus facile de laisser croire qu’on pourrait gagner en s’alignant sur telle ou telle course, plutôt que de venir et de prendre une fessée par les autres. Il faut arrêter de penser que certains mecs sont meilleurs que d’autres mais qu’ils refusent de rentrer dans le système de la fédération. Dans ce cas, qu’ils viennent gagner au Ventoux en déclinant la sélection après ».
Une véritable équipe est née
La course à la sélection suscite tout de même un intérêt grandissant chez les athlètes comme le confirme Philippe : « J’ai vu l’évolution depuis 2007 que je suis à la tête de l’équipe de France. A l’époque, ça n’intéressait pas grand monde chez les coureurs. Aujourd’hui qu’il y a des retombés médiatiques, et des résultats, je reçois déjà beaucoup plus d’appels d’athlètes qui aimeraient connaitre les modalités pour entrer en équipe de France ».
Il poursuit : « Je suis content quand je vois des athlètes qui viennent de team qui ne sont pas franchement pro fédération intégrer l’équipe de France. Ca veut encore dire quelque chose de porter le maillot de l’équipe de France, c’est d’ailleurs ce qui fait notre force ».
Pour autant, cela suffit-t-il à expliquer le succès du trail français au niveau international ? Pas vraiment ! « Certes, les athlètes ont l’amour du maillot, mais nous avons aussi constitué un groupe qui vit bien ensemble (parfois même trop), nous organisons des regroupements réguliers avant chaque grand événement, aujourd’hui nous sommes les seuls à faire ça. Les athlètes sont fiers de représenter leur pays, le sentiment d’appartenance à une équipe est essentiel dans notre réussite », conclut Philippe Propage.
Rendez-vous donc sur les pentes du géant de Provence en mars prochain pour connaître les noms de ceux qui rejoindront Sylvain court, Cédric Fleureton, Nicolas Martin et Benoit Cori chez les hommes ainsi que Sandra Martin, Céline Lafaye, Caroline Chaverot et Nathalie Mauclair chez les femmes qui sont déjà assurés (sauf blessure) de leur sélection. Une équipe de France qui a de l’allure et qui devrait une nouvelle fois jouer les premiers rôles, en individuel comme par équipe.