C’est une course qui au choix fait rêver ou qui fait peur : le MDS, 250km par étapes dans le désert marocain avec l’obligation d’avoir tout son matériel sur soi du début à la fin. Autant dire qu’il vaut mieux voyager léger… Contrôle du sac avec l’un des favoris, Antoine Guillon.
Trouver le bon compromis entre légèreté et confort, c’est le dilemme de nombreux coureurs au moment de préparer le sac. Antoine Guillon, lui, à vite tranché. « Depuis petit je suis habitué à dormir régulièrement à la belle étoile et à la dure. C’est quelque chose qui ne m’a jamais dérangé. » Il n’a par exemple pas emmené de matelas de sol et se passera de tous les petits conforts du quotidien. Son choix : le sac le plus léger possible. Le poids minimum selon le règlement : 6,5kg, qui comprennent le matériel obligatoire et la nourriture pour toute l’épreuve. (L’eau est distribuée au fur et à mesure) Ces dernières semaines, Antoine a donc sorti les ciseaux, la scie, et la machine à coudre pour gagner un maximum de poids.
Voici le contenu de son sac.
- le sac en lui-même bien sûr, un WAA Ultra Bag retouché : 350g
- une sleeping jacket Waa allégée, en guise de duvet : 518g
- drap de soie fait maison : 52g -frontale : 100g, plus la lampe de secours.
- casquette : 46g (elle ne sera jamais dans le sac)
- foulard : 18g (ne sera jamais dans le sac non plus)
- 10 épingles : 2g -boussole : 20g -briquet : 10g
- sifflet intégré au sac -couteau : 14g -antiseptique : 8g
- aspivenin : 32g -miroir : 16g
- couverture de survie : 52g
- crème solaire : 20g
- savon : 6g
- huile de massage : 10g
- pantalon coupe-vent Waa allégé : 56g
- lunettes de soleil : 24g
- brosse à dent/dentifrice : 10g
- gamelle : 64g -passeport : 36g
- semelle de confort en guise de tongs : 36g
- deux bouteilles : 48g
- plus 200g pour le matériel fourni par l’organisation, comme la balise GPS.
Poids total ? 1750 grammes. Imbattable. « J’ai gratté tous les grammes possible : plutôt qu’emmener des tongs pour le campement, j’ai par exemple installé des élastiques sur des semelles d’hygiène, plus légères. J’ai découpé ma brosse à dent, mon couteau, pour les produits d’hygiène j’ai pris les plus petites quantités possibles. » Le sac lui aussi a été revu centimètre par centimètre. « Là c’est un risque : il est pensé pour être confortable et éviter les blessures. Il s’agissait de l’alléger au maximum sans risquer des échauffements, des coupures. J’ai notamment changé la matière à l’intérieur des bretelles. »
Le plus lourd ? La nourriture !
1,7 kg pour le matériel, le reste est donc réservé à la nourriture. « J’ai cherché des menus avec le meilleur rapport poids/apport possible. Ce qui donne des plats très légers. Par exemple, un soir je vais manger du cabillaud lyophilisé, aux pommes de terres. Ça fait 100 grammes, bien sûr une fois qu’on ajoute l’eau c’est plus consistant. Ce qui représente 500 calories. À cela, j’ajouterai pour chaque repas 25 grammes de fruits secs, et 15 grammes de graines. » Petite astuce pour prendre un peu de plaisir : « j’ai emmené avec moi des cubes pour faire des bouillons juste après l’arrivée ou bien en entrée. Ça me donne l’impression de boire une petite soupe, c’est plaisant. Ça compte, pour le moral ! » Pour l’alimentation en course, ce sera nougats et barres de céréales. Tout compris, son sac atteint donc le poids minimum, 6,5kg. Quand beaucoup partent avec 9 ou 10kg sur le dos, voire plus.
« 100 grammes de trop, c’est 15 secondes perdues chaque heure »
Mais franchement, ça compte tant que ça ? Lui assure que oui. « J’ai fait mes calculs, c’est simple : pour 100 grammes de trop, je perds 15 secondes par heure de course. 1kg, c’est 2 minutes 30 ! » En sachant qu’il compte boucler le MDS en 25h environ, effectivement, on peut comprendre sa chasse aux grammes. Bien sûr son sac va s’alléger jour après jour puisqu’il va écouler sa nourriture. Ça tombe bien, il a prévu un départ prudent avant de monter en puissance : « je pense être aux alentours de la 25eme place après la 1ère étape. Je pense ensuite remonter petit à petit. » Avec un sac plus léger de jours en jours et une science de la course assez exceptionnelle, le métronome comme on le surnomme dans le milieu vise raisonnablement un TOP 10. Pendant ce temps, derrière lui, des milliers d’autres coureurs auront fait un autre choix : partir plus chargé, mais retrouver leurs claquettes, leur saucisson et leur matelas de sol tous les soirs. Parfois plusieurs heures plus tard. Une autre idée du Marathon Des Sables, qui ne les empêchera pas de dormir sous la même tente, côte à côte, qu’ils soient des coureurs « élite » ou des anonymes comme vous et moi. C’est aussi ça la magie de cette course.