Courir un premier marathon reste un moment unique dans la vie d’un coureur à pied, un souvenir impérissable, l’aboutissement de plusieurs mois de travail.
Le weekend dernier, pour mon 5ème marathon, j’ai donc eu la chance de revivre ce moment par procuration, à travers les yeux d’Anne que j’ai accompagnée pour sa toute première fois sur la distance mythique.
Après 12 semaines d’un plan d’entrainement commun qui a rythmé notre quotidien, le moment était enfin venu de concrétiser tout ça en prenant le départ du marathon de Turin.
Un marathon à l’image de sa ville, injustement méconnu, alors qu’il offre tout ce dont peut rêver un marathonien pour aller au bout de l’effort. Un profil propice à la performance (155D+), un tarif attractif (50 euros) et une organisation bien rodée.
Mais courir un marathon, c’est aussi l’occasion de partir à la découverte d’une ville encore inconnue. Si vous souhaitez combiner tourisme, culture et sport, je ne peux que vous conseiller la capitale du Piémont. Turin est une ville agréable à l’architecture baroque non dénuée d’intérêt qui gagne à être connue et visitée.
Un premier marathon c’est un peu comme faire un immense saut dans le vide, et il faut bien l’avouer, même si l’objectif unique reste de terminer, on ne peut s’empêcher d’espérer accrocher une première référence sur la distance.
Le jour du marathon est arrivé, c’est un peu le bout du chemin, la conclusion d’une belle aventure collective débutée au milieu du mois de juillet. Espérons que la conclusion soit à la hauteur du reste de l’histoire.
Le stress est palpable et se mêle inévitablement à l’excitation d’en découdre avec ce marathon que nous avons en point de mire depuis de longues semaines. Le moment est venu de se souvenir de toutes ces séances partagées, de ces entrainements matinaux où la volonté l’emporta sur l’appel de la couette et la promesse d’une grasse matinée …
Le coup de feu libérateur fait retomber la pression comme un soufflet, reste à accrocher le wagon qui nous mènera jusqu’à l’arrivée, sans encombre. Comme toujours, ça part vite, trop vite même pour certains qui tôt ou tard finiront par payer la note. Ne pas se laisser emporter par le flot continu de coureurs, rester dans la bonne allure, celle inlassablement travaillée à l’entrainement.
Les kilomètres défilent, la vue sur les montagnes environnantes fraichement enneigées permet de s’évader quelques instants. Turin se trouve au pied des Alpes, et par ce beau dimanche d’octobre, nous avons la chance de contempler une grande partie du massif.
Les conditions sont idéales, quelques groupes de musique nous accompagnent sur le parcours. L’ambiance n’est pas délirante, mais qu’importe, la simple présence de l’autre suffit à nous motiver dans l’accomplissement de cet objectif commun.
Le rythme est régulier, il n’y a que les pauses nécessaires, à chaque ravitaillement, pour ralentir notre progression. Après 2 heures de course, la difficulté de l’effort commence à se faire sentir sur les visages des marathoniens qui nous entourent, le silence s’installe peu à peu au cœur du peloton. Tels des robots, nous répétons inlassablement les mêmes gestes, pas après pas.
Jusqu’ici tout va bien, mais le fameux « mur » du 30ème kilomètre se présente bientôt à nous. Pour beaucoup, c’est le début d’une longue agonie que va durer 12 km. De notre côté, même si la foulée se fait moins aérienne, nous continuons de progresser à allure constante.
Reprendre un à un quelques coureurs trop ambitieux à quelque chose de grisant, un jeu cruel qui décuple la volonté de ne rien lâcher. Le marathon est une course d’attente où la gestion de l’effort l’emporte toujours sur la fougue, on l’apprend souvent à ses dépens.
Il ne reste plus que quelques kilomètres et même si la fatigue commence à gagner du terrain sur notre volonté commune, je sais à présent que nous allons réussir. Je suis si heureux pour Anne. La foule massée le long de ce grand boulevard qui mène à l’arrivée applaudit chaleureusement au passage des coureurs.
L’émotion est palpable sur son visage, les larmes coulent et les stigmates de l’effort accompli laissent bientôt place à un large sourire rempli de fierté. Anne s’apprête à franchir la ligne d’arrivée qui fera d’elle une marathonienne. Je sais ce que cela peut représenter, si bien qu’à mon tour je suis envahi par l’émotion de partager cet instant unique.
Après 3h38 d’effort nous tombons dans les bras l’un de l’autre. Toi qui pourtant n’osais pas y penser il y a encore quelques mois, te voilà marathonienne, et de la plus belle des manières. Tu peux être fière de ce que tu viens de réaliser. Merci de m’avoir fait revivre le grand frisson d’un premier marathon.
Sébastien Réby